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Ressentir l’existence d’un sixième doigt, c’est possible grâce à la réalité virtuelle

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- - Inria

Des chercheurs français ont imaginé une plate-forme expérimentale permettant de s'approprier un corps virtuel structurellement différent, au moyen d'un casque 3D et d'un… pinceau.

Oculus Rift, Samsung Gear VR, PlayStation VR… De nombreux casques de réalité virtuelle abreuvent un marché naissant et de plus en plus de personnes vont, à l’avenir, pouvoir se mettre dans la peau d’un avatar pour se mouvoir dans un espace virtuel et manipuler des objets.

Se pose alors la question de "l’incarnation virtuelle", c’est-à-dire de l’appropriation du corps de cet avatar. Plus cette incarnation est profonde, plus forte sera l’illusion de cet univers virtuel. Mais jusqu’où peut-on pousser ce transfert ?

Les recherches dans ce domaine sont encore à leurs débuts, mais un premier résultat intéressant nous arrive des laboratoires de l’Inria. Les chercheurs Anatole Lecuyer, Ludovic Hoyet et Ferran Argelaguet viennent de montrer qu’il est possible de ressentir dans la réalité virtuelle l’existence d’un sixième doigt. Pour le prouver, ils ont mis en place une plateforme expérimentale composée d’un capteur 3D Leap Motion et d’un casque Oculus Rift. Au travers de ce dispositif, 24 utilisateurs-cobayes ont été plongés dans un avatar dont les mains avaient un doigt supplémentaire entre l'annulaire et l'auriculaire. Les mouvements de ce nouveau membre étaient générés à partir des deux doigts environnants, par un calcul d'interpolation. Ce qui procurait un premier niveau d'appropriation.

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Les chercheurs ont ensuite brossé les doigts des testeurs un par un avec un pinceau. Ces mouvements étaient reproduits visuellement en temps réel dans l'univers virtuel, de sorte que l'utilisateur pouvait associer l'image et la sensation tactile. Quand le pinceau virtuel passait sur le 6e doigt, le pinceau réel brossait en réalité l'annulaire. Ce qui accentuait l'impression de son existence. Résultat: quand les chercheurs ont demandé aux utilisateurs de soulever leur 6e doigt, ces derniers ont bien eu le réflexe naturel de bouger l'annulaire dans 96 % des cas. "C'est le signe d'une forte appropriation. Cela prouve que l'acceptation d'un corps virtuel structurellement différent est possible", souligne Anatole Lecuyer.

Les chercheurs ne comptent pas s'arrêter en si bon chemin. De nombreuses questions restent en suspens. Quels autres types de structure corporelle pourrait-on s'approprier? Quelles sont les conditions nécessaires à cette appropriation? Quels sont les effets secondaires, tant au niveau comportemental que social? Cette recherche sur l'appropriation peut intéresser aussi bien les éditeurs de jeux, que les professionnels de la santé (pour la rééducation), du sport ou du cinéma.

La publication scientifique des chercheurs de l'Inria est disponible sur le site Web de "Frontiers in Robotics and Artificial Intelligence".