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Vous aimez les fausses informations sur Facebook? Vous allez adorer Telegraph

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- - CC, George Hodan

Le service de messagerie sécurisée Telegram lance un site de blogging 100 % anonyme. Avec les risques de dérives qui vont avec.

Lorsqu’on est cadre dans la Silicon Valley, il est bien vu de publier des billets sur Medium. Créé en 2012 par deux des fondateurs de Twitter, ce site permet à n’importe qui d’écrire sur ce qui l’inspire, dans n’importe quel domaine. Il vient d’être répliqué par Telegram, le service russe de messagerie sécurisée aussi bien utilisé par Daesh que nos politiques ou le Pape. Baptisé Telegraph, ce nouveau site de blogging diffère de Medium sur un point capital : il est anonyme et utilisable sans inscription.

Publier en un clic

L’interface de Telegraph est élémentaire, mais efficace. Sitôt arrivé sur le site, l’auteur peut ajouter un titre, son nom - ou pseudonyme, du texte mais également des images et des vidéos YouTube. Il lui suffit ensuite d’appuyer sur le bouton “publish” (“publier”) pour mettre l’article en ligne et le rendre accessible à tous. Ce principe de fonctionnement permet donc de partager des informations avec le plus grand nombre en un temps record. L’idée est louable mais risquée, surtout dans le contexte actuel.

L'interface de Telegraph
L'interface de Telegraph © BFMTV.com

Après l’affaire Snowden et les révélations régulières de WikiLeaks, Telegraph pourrait être l’outil idéal du lanceur d’alerte. Il pourrait également être utile à ceux qui désirent mettre des liens vers du contenu de plus de 140 caractères sur Twitter. Mais une publication sans source est par définition difficile à vérifier. Les informations seraient à ranger dans la catégorie des rumeurs. Au mieux, le site pourrait permettre de relayer des photos volées du prochain iPhone.

Un triple risque de détournement

Et il y a au moins trois façons dont un tel outil pourrait être perverti. D’abord en usurpant une identité. L’équipe de Telegram a choisi de laisser à l’auteur la possibilité de signer son billet plutôt que de rendre toutes les publications anonymes. Ecrire sous la plume de François Hollande, Lady Gaga ou votre voisin de palier n'est pas un problème. Il incombera à ce dernier de démentir “ses” propos.

Ensuite, la diffusion de fausses informations est facilitée. Alors que Facebook et Google luttent contre des milliers d’articles mensongers relayés par certains de leurs utilisateurs, Telegraph semble parfaitement taillé pour la propagande. C’est d’ailleurs son but implicite, à en croire le blog officiel de Telegram. “Avec Telegraph, vous pourrez écrire des articles comme les médias traditionnels (même s’il vous sera peut-être difficile d’être aussi partiaux)” peut-on y lire. Une prise de position dans la lignée de celles de Pavel Durov, fondateur de Telegram.

Enfin, le thème de la censure n’a pas été abordé. Après les attentats de novembre 2015, Telegram annonçait avoir bloqué 78 chaînes liées à Daesh. Mais on ne connaît pas encore les règles qui encadreront la publication des billets de blog, notamment concernant les images choquantes ou violentes. Si Telegram est déjà utilisé par des groupes terroristes, on peut craindre qu’ils fassent de Telegraph un nouvel outil de revendication.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co