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Une peau artificielle pour ajouter le sens du toucher aux prothèses

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- - AFP PHOTO / HANDOUT / DARPA

Cette technologie pourrait éliminer la sensation du membre fantôme qui affecte de nombreuses personnes amputées.

Des chercheurs américains devraient améliorer la vie des personnes amputées d’un membre en ajoutant aux prothèses une caractéristique importante : le sens du toucher. Pour cela, ils ont développé une peau artificielle expérimentale capable de sentir des objets. Ce n’est pas la première fois que des travaux sur la peau artificielle sont effectués mais ils étaient à l'origine destinés à des robots.

Les nouveaux travaux, aux tous premiers stades de développement, concernent l’être humain et pourraient améliorer le contrôle des prothèses et minimiser, voire éliminer, la sensation du membre fantôme qui affecte environ 80% des amputés, selon les chercheurs.

This handout photo obtained from the US Defense Advanced Research Projects Agency(DARPA) on September 14, 2015 shows a volunteer amputee fitted with an experimental prosthetic hand that lets him "feel" sensations, holding a soada can. After six years of development, the Revolutionizing Prosthetics program developed two anthropomorphic advanced modular prototype prosthetic arm systems, including sockets, which offer increased range of motion, dexterity and control options. The Revolutionizing Prosthetics program is ongoing and aims to continue increasing functionality of the DARPA arm systems so servicemembers with arm loss may one day have the option of choosing to return to duty. Additionally, the dexterous hand capabilities developed under the program have already been applied to small robotic systems used in manipulating unexploded ordnance, thus keeping soldiers out of situations that have led to limb loss prothèse
This handout photo obtained from the US Defense Advanced Research Projects Agency(DARPA) on September 14, 2015 shows a volunteer amputee fitted with an experimental prosthetic hand that lets him "feel" sensations, holding a soada can. After six years of development, the Revolutionizing Prosthetics program developed two anthropomorphic advanced modular prototype prosthetic arm systems, including sockets, which offer increased range of motion, dexterity and control options. The Revolutionizing Prosthetics program is ongoing and aims to continue increasing functionality of the DARPA arm systems so servicemembers with arm loss may one day have the option of choosing to return to duty. Additionally, the dexterous hand capabilities developed under the program have already been applied to small robotic systems used in manipulating unexploded ordnance, thus keeping soldiers out of situations that have led to limb loss prothèse © AFP PHOTO / HANDOUT / DARPA

Leurs travaux, signés notamment par Alex Chortos et Andre Berndt de l'Université de Stanford en Californie, sont publiés jeudi dans la revue américaine Science. Les auteurs expliquent avoir utilisé des circuits organiques souples et des capteurs de pression pour reproduire la sensibilité de la peau. Ils précisent avoir pu transmettre ces signaux sensoriels à des cellules cérébrales de souris en laboratoire en recourant à l'optogénétique. Nouveau champ de recherche combinant l’optique et la génétique, l’optogénétique est principalement basée sur une protéine qui possède la propriété d’être activée par la lumière bleue.

Les auteurs sont parvenus à convertir la pression statique d'un objet sur la peau en signaux numériques comparables aux différents degrés de force mécanique que peut ressentir une peau humaine. Pour les capteurs, ils ont utilisé des nanotubes de carbone moulés en forme pyramidale, particulièrement efficaces pour canaliser les signaux du champ électrique des objets à proximité. Ces derniers sont captés par des électrodes, et ce d'une manière à maximiser la sensibilité.

Un véritable défi scientifique

Le transfert des signaux numériques captés par la peau artificielle jusqu'aux neurones provenant du cortex cérébral de souris a présenté une grande difficulté: les protéines utilisées en optogénétique ne stimulent en effet pas les cellules neuronales suffisamment longtemps pour permettre de ressentir ces signaux numériques, expliquent les chercheurs.

Ces derniers ont donc dû fabriquer de nouvelles protéines optogénétiques, capables de laisser de plus longs intervalles entre les stimulations pour permettre aux neurones de réagir. La peau des mammifères est formée de couches multiples de matériaux viscoélastique et peut être étirée jusqu'à 125% de ses dimensions au repos sans perte apparente de sensibilité aux stimulations externes, telles que la pression ou la température, indiquent les chercheurs.

Dans un article également publié dans Science commentant cette étude, Polina Anikeeva et Ryan Koppes, du laboratoire de recherche électronique du Massachusetts Institute of Technology (MIT), notent que reproduire les propriétés mécaniques et les fonctions de la peau "demeure un défi difficile en ingénierie" tout en jugeant ces travaux prometteurs.

Ces chercheurs, qui n'ont pas participé à l'étude, soulignent l'accélération des progrès dans le champ des circuits électroniques souples et organiques qui permettent de développer des capteurs épidermiques miniatures. Cependant, ces derniers sont souvent limités par leur alimentation électrique, notent-ils.

François BEDIN avec l'AFP