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Maestro, le super robot du CEA qui survit aux environnements hostiles

Le robot Maestro du CEA.

Le robot Maestro du CEA. - CEA

Flexible, modulable et hyper résistant, ce robot vient d'entrer en action en France pour démanteler des sites radioactifs. Nous avons pu approcher la bête au plus près.

Maestro, ce n'est pas un chef d'orchestre... mais un robot du CEA unique au monde. Conçu pour intervenir en milieu hostile, il est capable de démanteler des installations hautement radioactives et inaccessibles pour l'homme. C'est à Marcoule dans le Gard, au chevet de sites irradiés, que nous avons pu le voir en action.

Toute en titane, la bête est impressionnante avec ses 2,40 mètres de long, mais aussi son extrême flexibilité obtenue grâce à ses moteurs hydrauliques et ses six degrés de liberté, c'est-à-dire ses six axes de rotation.

Ce bras robotisé semblerait presque humain, et pour cause : il a été imaginé comme le prolongement du corps des opérateurs qui le manipulent à distance.

Le bras Maestro en pleine découpe laser.
Le bras Maestro en pleine découpe laser. © CEA

Un super robot capable de résister aux pires radiations

Les points forts de Maestro? Sa capacité d'emport et sa modularité.

"Il peut saisir toutes sortes d'outils de plusieurs dizaines de kilos: perceuse, meuleuse, découpeuse laser, caméra gamma, sonde, et même...aspirateur", nous explique Didier Leterq, chef du département de technologie du CEA qui a piloté le projet.

"Et surtout, il est réutilisable quelle que soit la configuration du chantier", ajoute-t-il. 

Il est aussi particulièrement endurant, puisque sa structure durcie est capable de supporter des doses d'irradiation cumulées de plus de 10 000 grays. Pour comparaison, la dose létale pour l'homme est de quelques grays. Si quelqu'un pénétrait dans la zone d'action de Maestro, il n'y survivrait pas plus de 30 minutes. On comprend donc que le robot opère totalement confiné dans une zone bétonnée et seulement visible depuis un hublot. Ses circuits électroniques sont malgré tout enfouis dans la structure et déportés au maximum hors des zones irradiées qui peuvent les perturber.
Un opérateur en train de manipuler le bras maître de Maestro.
Un opérateur en train de manipuler le bras maître de Maestro. © CEA

Pour piloter Maestro, il faut deux opérateurs à minima. Le premier manipule un joystick, le bras maître, avec retour de force comme s'il tenait vraiment l'outil en main. Il commande ainsi le bras esclave qui se trouve directement sur le théâtre de l'opération. L'opérateur s'assure de la précision de son geste grâce aux écrans de contrôle des deux caméras qui filment Maestro à l'intérieur de la cellule.

Le second oriente les caméras à partir d'une dalle tactile. Tous ont été formés et ont pu longuement s'entraîner au centre du CEA de Marcoule grâce des dispositifs de réalité virtuelle reconstituant avec le plus de réalisme possible les conditions du terrain.

Les opérateurs sont formés grâce à des dispositifs de réalité virtuelle.
Les opérateurs sont formés grâce à des dispositifs de réalité virtuelle. © CEA

Il faut plusieurs années pour démanteler un site

Tout a débuté au milieu des années 90, lorsque le CEA a dû commencer à dénucléariser certaines de ses installations. C'est à cette époque que naît l'idée d'un robot de la trempe de Maestro, développé par la société privée Cybernetix. Des années de recherche et de développement ont suivi avant qu'il ne puisse entrer en activité au mois de décembre 2015 sur l'usine UP1 d'extraction du plutonium, fermée en 1997, que nous avons pu visiter.

La mission de notre robot consiste à découper au laser de gigantesques cuves de dissolution. Ce sont donc des structures en acier de plusieurs centimètres d'épaisseur qu'il faut désolidariser. La tâche est fastidieuse : il faut 50 heures cumulées pour venir à bout d'un seul équipement.

Les travaux ne seront donc pas achevés avant au moins deux ans. Mais le CEA prépare déjà son prochain chantier : le démantèlement du site de Fontenay-aux-Roses qui doit débuter en 2018. Toute une équipe est déjà sur le pont pour élaborer différents scénarios qu'il va falloir répéter jusqu'à pouvoir les exécuter parfaitement sur le terrain.

Aujourd'hui, Cybernetix a réussi à industrialiser la fabrication de Maestro. Vu ses qualités, le robot pourrait intervenir dans d'autres domaines que le démantèlement nucléaire : sous l'eau ou en profondeur, par exemple, pour faire de l'exploration pétrolière. Maestro est donc prêt aujourd'hui à être exporté dans le monde entier et, pourquoi pas... jusqu'à Fukushima.