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Une entreprise prétend reconnaître pédophiles et terroristes à leur visage

Faception prétend pouvoir reconnaître un terroriste à son visage

Faception prétend pouvoir reconnaître un terroriste à son visage - Faception

La start-up Faception présente un logiciel permettant de débusquer certains traits caractéristiques de criminels.

Un logiciel peut-il déterminer notre dangerosité? En utilisant la reconnaissance faciale, c’est déjà le cas. Il s’agit alors de comparer le visage d’individus filmés à une base de données, afin de savoir s’ils ont déjà commis des faits de violence. Mais la start-up israélienne Faception prétend pouvoir aller plus loin : déterminer qui est un pédophile ou un terroriste en se contentant d’analyser les traits d’un visage. Et ce, même si la personne concernée n’a jamais fait parler d’elle. Mais la fiabilité du logiciel et la finalité du processus posent quelques questions.

Un postulat douteux

Selon un article publié sur le site du Washington Post, Faception utiliserait nos traits physiques afin de nous ranger dans l’une des quinze catégories établies par Shai Gilboa et son équipe. On retrouve celle des pédophiles, des terroristes… mais aussi des bons joueurs de poker. C’est d’ailleurs dans ce domaine que la start-up a fait l’une de ses premières démonstrations. A en croire Faception, son algorithme aurait analysé le visage de cinquante participants à un tournoi de poker. Parmi les quatre joueurs désignés comme les meilleurs, deux se seraient retrouvés en finale. Toujours selon le média américain, l’entreprise aurait déjà conclu un contrat avec une agence de sécurité intérieure, sans toutefois citer laquelle.

Pour développer son projet, Shai Gilboa est parti d’un double postulat. Celui que notre personnalité est déterminée par notre ADN, et que cette part de notre ADN transparaît sur notre visage. Des affirmations qui sont loin d’être partagées par l’ensemble de la communauté scientifique. Par ailleurs, l’entrepreneur reste extrêmement flou sur le fonctionnement de sa technologie.

Qui encode la machine?

Comme l’explique Martial Guédron, professeur à l’Université de Strasbourg et auteur de Visage (s). Sens et représentations en occident (Ed. Hazan, 2015), il est essentiel de connaître les bases de données utilisées par Faception. “Si la machine décode nos traits, il faut savoir qui encode, et selon quels critères”, explique-t-il. “Même si le logiciel se base sur des photos de condamnés pour pédophilie ou terrorisme, encore faut-il qu’elles puissent parler de manière objective. Or une photo n’est jamais objective. Sur un cliché pris par la police, par exemple, les traits ont de bonnes chances d’être plus durs du fait de l’éclairage, de la fatigue, et des conditions de prise de vue”, affirme-t-il, avant de conclure : “Je me méfie beaucoup de cette confiance aveugle vis-à-vis des nouvelles technologies”. 

Le manque de transparence sur la méthodologie utilisée appelle donc à la méfiance vis-à-vis de Faception, d’autant qu’il s’agit avant tout d’une entreprise ayant pour objectif de vendre sa technologie. Par ailleurs, la question de l’éthique est également posée. Que faire face à un individu jugé comme pédophile par des algorithmes - mêmes fiables, sans que celui-ci n’ait commis la moindre infraction?

Contrairement à Google ou Facebook qui développent des technologies de reconnaissance faciale plus classiques, Faception remet au goût du jour de vieilles techniques utilisées durant les siècles passés, parmi lesquelles la physiognomonie. Au XIXe siècle, des criminologues comme Cesare Lombroso recherchaient déjà le “criminel type” selon les différentes morphologies. A ce titre, la start-up ne pourrait être que le fruit moderne d’un fantasme vieux comme le monde, celui de connaître son semblable au premier regard.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co