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Vie numérique

Faut-il interdire les contacts entre élèves et professeurs sur Facebook ?

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Dans certains Etats américains, un prof ne peut plus être ami avec un élève... du moins sur Facebook et Twitter. Une interdiction qui pourrait bien se propager en France. Enseignants et élèves témoignent. Et vous, qu'en pensez-vous ?

Dès le 18 août prochain, dans le Missouri aux Etats-Unis, il sera illégal pour un professeur d’être ami avec un élève sur Facebook et Twitter. Et ça l'est déjà dans l'Etat de Virginie depuis mars dernier. Dans l’hexagone, aucun cadre n'existe pour réguler les relations virtuelles entre profs et élèves. Luc Chatel, le ministre de l'Education, a bien annoncé un partenariat avec Facebook en mai dernier pour prévenir le harcèlement virtuel entre élèves, mais il n'est pas élargi aux profs.
Pour éviter les dérapages et pour plus de vigilance, les parents d'élèves peuvent appeler l'association E-enfance et signaler des abus. L'association se charge ensuite de transmettre la demande à Facebook, qui supprime les comptes des élèves harceleurs.
Pourtant, des dérives existent. Aujourd'hui, un professeur de technologie de 28 ans, au collège de Poissy dans les Yvelines, comparait devant le tribunal correctionnel de Versailles pour avoir fait des avances à une de ses élèves de 11 ans sur Facebook. Un an de prison avec sursis est requis à l'encontre du professeur. Selon le procureur, le professeur serait un "apprenti pedophile". Il avait fait des avances claires, sans ambiguîté à son élève, lui demandant un rapport sexuel avec préservatif et lui donnant rendez vous dans un parc. Le jugement doit être rendu ce mercredi en fin de journée.

« De plus en plus de parents craignent une relation trop affective »

Justine Atlan est directrice de l'association E-enfance, dont l'objectif est de permettre aux enfants et adolescents de se servir des nouvelles technologies de communication tels qu’internet, le téléphone mobile et bien d’autres, avec un maximum de sécurité. Elle reçoit de plus en plus d’appels de parents d'élèves inquiets : « Ils nous appellent pour se plaindre de certains professeurs qui ont des relations peut-être un peu trop privilégiées avec leurs enfants. Ils se parlent beaucoup via Facebook et s’envoient des choses via ce réseau social, en dehors de la classe. Ces parents se demandent si c’est autorisé ou pas et s'ils peuvent faire quelque chose contre. Il y a une espèce de crainte, de la part des parents, qu’il puisse éventuellement avoir une relation affective, sentimentale, voir sexuelle entre un professeur et un élève. Sachant qu’il y a ce problème de majorité, de minorité et éventuellement ce lien de subordination. »

« Ils n’ont pas à voir ma vie privée »

Sophie est enseignante de Français au collège et elle reçoit beaucoup d’invitations sur Facebook : « J’ai beaucoup de demandes de mes élèves. Une quinzaine, voire une vingtaine cette année. Par principe, je ne veux pas les accepter tant que je les ai comme élèves parce que je considère qu’ils n’ont pas à voir ma vie privée. Il y a un élève qui a créé un groupe, un fan club donc c’est plutôt sympa. Ils sont très friands des petites anecdotes sur la vie de leurs professeurs. »

« Ça permet d’échanger des vidéos en rapport avec les cours »

Yves Patte est professeur de sciences sociales au lycée dans le Nord et lui, est ami avec une centaine de ses élèves. Pour lui, c’est avant tout une manière d’échanger plus simplement : « Il y a une règle, c’est à partir de la dernière année lorsqu’ils ont 17, 18 ou 19 ans. Cela permet de prolonger la situation d’enseignement et d’échanger des vidéos en rapport avec les cours. Je ne suis pas réellement ami avec mes élèves, notre relation n’a pas changé. C’est simplement qu’on est connectés à un réseau social et on peut échanger des informations. »

« Certains nous ajoutent pour nous espionner »

Rebecca, 16 ans, est en seconde et reçoit des invitations sur Facebook de la part de ses professeurs. D’après elle, ce n’est pas toujours bien d’avoir son enseignant parmi ses amis : « Certains nous ajoutent pour nous espionner. Il y en a d’autres qui utilisent des pseudos. Ils commentent nos photos ou nos statuts. Un jour j’avais posté un statut comme quoi je devais fêter quelque chose avec une copine en dehors du lycée et mon prof m’a dit que je ferai mieux de me concentrer sur son cours du lendemain. Alors, c’est pour rigoler mais il le dit quand même. Au début c’est assez marrant de voir son prof sur Facebook mais ensuite, ça devient vite lassant. »

La Rédaction avec Amandine Dubiez